Bonne Année quand même !

Plus que quelques heures avant que la Côte d’Ivoire n’entre de plain-pied dans la nouvelle année. Une année d’espérance certes, mais aussi de doutes et d’incertitudes alors que se profile à l’horizon la présidentielle d’octobre 2025.

La consultation pour le renouvèlement dans ses fonctions du personnel politique, notamment le premier des citoyens, a toujours constitué l’une des causes de mortalité.

Depuis 1995, l’élection présidentielle – excepté 2015 – a rarement failli à sa meurtrière réputation. Quid de 2025 ? Chacun, en connaissance de cause, est en droit de se poser la question et de s’inquiéter…

Jusqu’au-boutisme palpable

De part et d’autre, le jusqu’au-boutisme est palpable. Les entrepreneurs politiques refusent de lâcher prise. Les faucons bandent les muscles. La politique, forme la plus haute de la charité, de l’amour du prochain selon la formule du pape Pie XI (6 février 192210 février 1939) régulièrement reprise à son compte par son successeur François, se vide de son essence. On la confond avec une entreprise au service « d’ambitions individuelles, de factions dominantes et d’intérêts particuliers », rappelait fort à propos le chef de l’église catholique en 2017.

La bataille pour la défense des intérêts politiques révèle la face hideuse d’un pays qui redevient – comme chaque cinq ans – amnésique. Tourmenté par les démons de la division et de la haine. Incapable de se projeter comme un Etat-Nation. Tout le contraire de ce que devrait produire le service à la communauté.  

Occasions de dépassement

Ce ne sont pas les occasions du dépassement des clivages, du raffermissement de l’unité nationale qui ont manqué en 2024.

Le sacre continental en février des Eléphants footballeurs à domicile. La troisième du genre à la coupe d’Afrique des nations au terme d’un scénario renversant. Symptomatique de la résilience d’une jeunesse généreuse dans l’effort, capable de sursaut et d’orgueil lorsque tout semblait perdu.

Le soutien des mélomanes et d’un peuple à l’œuvre musicale « djénéba djaba » de l’artiste Débordo Lekunfa. L’extraordinaire mobilisation pour pousser la cheffe Zeinab Bancé à repousser ses limites physiques pour battre un record Guiness. Preuve que l’union n’est pas toujours un vain mot…

Des événements à jamais gravés dans le marbre de notre mémoire collective qui rappellent non sans fierté que le cœur des Ivoiriens bat parfois à l’unisson. 

De ces succès, surtout les derniers en date, la leçon à retenir est que les initiateurs ont su impulser la dynamique et imposer le rythme. Sans attendre le mot d’ordre d’un gourou. Il est donc possible de s’émanciper du mentorat politique pour prendre son destin en main !  Un enseignement à retenir en 2025.

Construire un État de droit

Alors que le spectre d’une remise en cause des principes fondamentaux de la démocratie menace de faire voler en éclats la fragile concorde nationale, replacer l’intérêt général au centre du contrat social devient impératif. Après tous les traumatismes vécus, ce n’est plus une option. Mais la seule issue vers la construction d’un Etat de droit.  Un projet viable qui accorde la prééminence à l’importance de servir la nation et non de s’en servir, garantit que chaque décision politique est guidée par la volonté de répondre aux besoins de l’ensemble des citoyens.

Socle d’une prospérité durable

Dans un pays où les crises institutionnelles, filles des manipulations constitutionnelles sont latentes, il y a urgence à agir de façon concertée pour préserver la vie et la dignité humaines. Ceux qui bombent la poitrine, s’offrent en sacrifice pour des causes politiques n’en sont pas toujours les grands bénéficiaires. Ils sont trop souvent récompensés par l’ingratitude et le mépris.

Il urge d’agir pour empêcher que des septuagénaires et des octogénaires en conflit avec l’arithmétique, courent le risque de piquer une attaque vasculaire cérébrale (AVC) en se lançant dans un périlleux exercice de contorsions phraséologiques, pour expliquer que 3+1 ne font plus quatre mais deux !  L’image qui se dégage est désastreuse. Contreproductive pour la formation des enfants. Que pensent les apprenants de leurs formateurs lorsqu’à longueur de tribunes politiques, ils entendent répéter des fausses vérités  ? Vite, un barrage contre la négation des valeurs. 

Devoir d’exemplarité

La quête ou la conservation du pouvoir ne devraient pas constituer un permis de transgression morale mais une astreinte à un devoir d’exemplarité. Un devoir d’humanité ! Ne l’ignorons pas, « les royaumes s’effondrent, les régimes passent… ». Rien, en dehors de Dieu, n’est éternel !  Il est donc illusoire d’aspirer à la stabilité sans rupture avec le paradigme des hommes forts. 

Seules des institutions fortes, impartiales et qui imposent respect léguées à la postérité confèrent le statut d’Homme d’Etat.  Elles sont le socle d’une démocratie véritable. Celle qui protège les droits des citoyens, assure une alternance politique pacifique au terme d’élections libres, justes, transparentes et inclusives. Un luxe qui pour l’heure semble hors de portée de la Côte d’Ivoire. 

Engagement collectif

Il ne s’agit pourtant pas d’un obstacle infranchissable. Avec un engagement collectif des hommes politiques dépouillés de leurs aspirations d’éternité, des citoyens vigilants, désireux d’un avenir meilleur, des leaders religieux et communautaires, moins militants, porteurs des idéaux de justice et de paix, des jeunes conscients de leurs responsabilités devant l’histoire, il est possible de redessiner les contours d’un ordre politique plus sain. En attendant, d’y parvenir, Bonne Année quand même ! 

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